Chaud-froid.
Par cette belle matinée de printemps, le temps est ensoleillé et la température extérieure de 12 degrés. C’est un temps typique de mi-saison, matinée fraîche avec montée du mercure dans la journée. Joséphine et Samia arrivent à la crèche. Tiens ! Joséphine est habillée d’un collant en laine, d’un pull bien chaud, d’une grosse doudoune sans oublier le bonnet et l’écharpe, alors que Samia est jambes nues avec simplement sweet + petit blouson légér (et tête nue bien entendu).
Que s’est-il passé ?
La réponse est simple : Joséphine a été habillée par sa maman alors que Samia l’a été par son papa.
Le phénomène courant de sur-couvrage maternel parallèle au sous-couvrage paternel est très ancien et ne s’arrête pas à la petite enfance. Cher client, heu… pardon, cher lecteur, avez-vous remarqué que même adulte, c’est bien de la bouche de votre mère que sortiront les expressions du genre : « ça s’est rafraîchit », « mais couvres-toi donc », « tu es sûr que tu ne veux pas que je te prête une écharpe », ou encore « ne rentre pas trop tard, surtout, ne prends pas froid » (ça, c’est de la mère à Léo) ; tandis que votre père vous demande « au fait, ta voiture, ça va, t’en es content ! ».
Clichés, mes direz-vous.
Réalité vous répondrais-je.
Réalité expliquée même, puisque grâce à mes travaux, ce mystérieux phénomène se voit éclairé d’un jour nouveau.
L’acte de couvrir est, pour la mère, un acte protecteur. C’est également un acte qui la projette dans sa propre enfance où son loisir préféré était d’habiller et de déshabiller ses poupées. En prolongeant cet acte, la mère cherche au maximum à se rapprocher de son enfant en redevenant la petite fille qui, étrangement, ressemble tellement à la petite fille qu’elle est en train de sur-habiller avant de l’emmener à la crèche. ..
Pendant son enfance, le père, lui, jouait au ballon, et il n’est pas bon d’être trop couvert pour jouer au ballon : on a vite chaud et ça freine la motricité.
Maintenant, l’enfant trop couvert ne risque-t-il pas de refuser de manger puisque, engoncé dans ses vêtements, il n’a plus la place de se développer ? Et l’enfant pas assez couvert ne risque-t-il pas de faire exprès de tomber malade pour retrouver la chaleur maternelle et exprimer à son père son désir de ne pas avoir la pression pour devenir footballeur ?
Je n’ai pas encore de réponse définitive à ces questions, mais d’ici mon prochain bouquin, ça sera chose faite.
On notera également que si les pères couvrent moins les enfants, c’est aussi parce que l’égalité hommes-femmes n’est pas effective MÊME chez les bobos, et c’est donc la mère qui emmènera le môme chez le médecin et qui organisera la garde parce que, tu comprends, en ce moment, j’ai vraiment trop de boulot (« ha bon, parce que, moi, je ne travaille pas, peut-être !!! », « ben, je sais pas, on pourrait peut-être demander à ta mère » etc. comme quoi les pères sont cons parce qu’un gosse malade, ça entraîne toujours des tensions dans le couple, mais ceci sera l’objet d’une autre chronique).
En conclusion, tout cela va très loin, j’en conviens, et je crains qu’il soit encore un peu tôt pour que mes théories soient vraiment comprises. Mais peut-être penserez-vous à moi quand, dans 20 ans, vous direz aux parents de vos petits-enfants « ne rentre pas trop tard, surtout, ne prends pas froid » ou « au fait, ta voiture, ça va, t’en es content ! ».
Docteur Jean-Tube Charlatus, glandopsychobobo à la Clinique des Glands.
Dernier ouvrage paru : “La grande aventure du gland” aux Éditions PUG (Presses Universitaires des Glands).